L’impératrice Eugénie à la fin de sa vie (photographie tirée de sa notice biographique sur wikipédia).
Il y a cent ans de cela disparaissait à Madrid l’impératrice Eugénie, veuve de Napoléon III. Mais ne manqueront pas de se demander les lecteurs les plus critiques de mes billets quels rapports l’ex-impératrice des Français peut-elle bien avoir entretenus avec l’empereur Guillaume II ? C’est que, même de façon anecdotique, elle a plus ou moins directement croisé le chemin du Kaiser.
A l’hiver 1869-1870 tout d’abord, lorsqu’elle participa à l’inauguration du canal de Suez, tout comme le Kronprinz Frédéric de Prusse, père du futur Guillaume II. A l’été 1907 ensuite, lorsqu’au cours de l’une de ses croisières, le Kaiser lui rendit personnellement visite à bord de son yacht Thistle. En novembre 1918 encore, lorsque des wagons de son ancien train spécial sont mis par les alliés à la disposition des plénipotentiaires allemands venus négocier l’armistice. A la fin de cette même année 1918 enfin alors que se préparait le traité de Versailles, lorsqu’elle envoya à Clemenceau une vieille lettre que le roi Guillaume de Prusse lui avait adressée dans laquelle le souverain lui précisait qu’il ne considérait pas l’Alsace et la Lorraine comme terres allemandes mais comme provinces stratégiques.
Lors de la guerre, l’ex-impératrice avait aussi proposé au gouvernement français de mettre à sa disposition sa résidence du cap Martin pour en faire un hôpital militaire dont elle couvrirait les frais de fonctionnement ; son offre généreuse fut déclinée. Elle fera de même avec sa résidence de Farnborough et son yacht Thistle au profit des blessés anglais ; le roi George V accepta avec empressement et la nomma chevalier de l’empire britannique. Elle fit dire à Farnborough un Te Deum en l’honneur de la victoire alliée et assista à Paris au défilé triomphal du 14 juillet 1919 depuis l’hôtel Continental où elle était descendue sous le nom d’emprunt de comtesse de Pierrefonds.
L’impératrice Eugénie à Farnborough avec des blessés britanniques.
A sa mort, sa dépouille fut rapatriée de Madrid à Farnborough pour y être inhumée dans l’abbaye qu’elle avait fondé et où reposaient déjà son mari et son fils. Les obsèques eurent lieu en présence de roi George V et de la reine Mary, ainsi que du roi d’Espagne Alphonse XIII et de son épouse. Dernière petitesse républicaine à son égard, le gouvernement français insista auprès du gouvernement britannique pour que la cérémonie ne comporte pas d’honneurs militaires et n’y envoya aucun représentant. Cette mesquinerie semble perdurer, aucune cérémonie officielle ne venant marquer le centenaire de la mort de celle qui resta, malgré les échecs et les épreuves, une grande patriote française 1…
1 Même les féministes, si souvent promptes à monter au créneau, auront oublié cette date alors que l’impératrice aura su défendre leur sexe face aux hommes en accordant notamment la Légion d’Honneur à Rosa Bonheur (première femme à se voir octroyer cette décoration) ou en soutenant la première bachelière française dont l’Université ne voulait pas entendre parler.
A la fin du film, on aperçoit le roi George V en habit et haut de forme.
Le lecteur qui voudra approfondir sa connaissance de la personnalité attachante de l’impératrice pourra se reporter avec profit aux belles biographies qui lui ont été consacrées par Lucien Daudet (fils d’Alphonse, frère de Léon) et par Jean des Cars.