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10 mars 2013 7 10 /03 /mars /2013 08:23

 

 

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Vue de Windsor depuis les rives de la Tamise (la chapelle Saint-Georges est visible ente les deux plus hautes tours).

 

Le 10 mars 1863, il y a donc 150 ans jour pour jour, le prince Albert Edouard de Saxe-Cobourg-Gotha, alors prince de Galles et futur roi Edouard VII (1841-1910), épousait dans la chapelle Saint-Georges du château de Windsor la princesse Alexandra Caroline Charlotte Louise Julie de Schleswig-Holstein-Sonderburg-Glücksbourg (1844-1925), fille aînée du prince Christian de Glücksbourg qui deviendra le roi Christian IX de Danemark dès le 15 novembre suivant.

 

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Intérieur de la chapelle Saint-George.

 

Lors de cette cérémonie à caractère familial, politique et diplomatique, le royaume de Prusse se fit représenter par son prince, héritier Frédéric Guillaume Nicolas Charles de Hohenzollern (1831-1888), par l’épouse de celui-ci, née princesse Victoria Adélaïde Marie Louise de Saxe-Cobourg-Gotha (1840-1901), sœur du marié, ainsi que par le fils premier né du couple alors âgé de quatre ans, le futur empereur Guillaume II.

 

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Le Kronprinz Frédéric en famille au début des années 1860 (gravure d’époque inspirée d’un tableau de F. X. Winterhalter).

 

Dans sa biographie du roi Edouard VII écrite en utilisant les papiers personnels restés jusque-là inédits d’amis du roi (le marquis de Soreval 1, sir Ernest Cassel 2, le comte de Mensdorff 3) Gordon Brook-Shepherd donne un récit vivant de l’attitude du futur Kaiser lors de la cérémonie religieuse (Edouard VII et l’Europe ; Hachette, 1977 ; pp. 29-30).

1 Luis de Soreval (+ 1922), surnommé le « singe bleu », grand ami et compagnon de bamboche du prince puis du souverain, fut ambassadeur du Portugal à Londres.

2 Ernest Joseph Cassel (1852-1921), banquier anglais d’origine allemande, converti au catholicisme ; il était pour le prince Edouard à la fois un ami et un conseiller financier très écouté.

3 Albert de Mensdorff-Pouilly (1861-1945), diplomate autrichien qui fut ambassadeur à Londres de 1904 à 1914, était un des proches de la famille royale anglaise du fait du mariage de son grand-père paternel, le comte Emmanuel, avec une tante de la reine Victoria, ainsi que de l’amitié de son père, le comte Alexandre, avec le prince Albert de Saxe-Cobourg, mari de la reine Victoria.

 

Vicky 4 […] était venue, accompagnée de son mari, le prince héritier de Prusse, qui fit office de « garçon d’honneur ». Mais le plus intéressant des Hohenzollern présents ce jour-là, tant pour l’avenir de l’Europe que pour celui du marié, était Guillaume, leur fils, âgé de quatre ans – le futur Kaiser.

4 Surnom familier donné à la princesse royale Victoria par sa famille.

 

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Bénédiction des époux – le kronprinz Frédéric est juste derrière le marié et le prince Christian de Glücksbourg derrière la mariée ; on remarquera en haut à droite la reine Victoria qui assiste à la cérémonie depuis une loge particulière. Les deux jeunes garçons en costume écossais que l’on voit sur le devant de la scène sont sans doute les jeunes ducs de Connaught et de Clarence.

 

Dans son petit costume écossais, ce bambin un peu négligé par l’assistance fut bientôt exaspéré de la durée de la cérémonie et vexé qu’on ne fît pas attention à lui parce que son oncle d’Angleterre épousait cette demoiselle de Danemark. Il était encadré par deux autres de ses oncles anglais, le prince Arthur – duc de Connaught 5 – et le prince Léopold – duc d’Albany 6 – frères du marié, eux aussi en kilt. La tentation fut trop forte pour Guillaume qui, après avoir tenté de créer une diversion à l’aide de son minuscule poignard des Highlands, passa le reste du service à enfoncer alternativement, et à tour de rôle, ses petites dents et ses petits ongles dans les mollets, augustes mais vulnérables, qui s’offraient à sa portée.

5 Arthur William Patrick Albert de Saxe-Cobourg-Gotha (1850-1942), duc de Connaught et de Strathearn, 7ème enfant de la reine Victoria et du prince Albert.

6 Leopold George Duncan Albert de Saxe-Cobourg-Gotha (1853-1882), duc d’Albany, 8ème enfant de la reine Victoria et du prince Albert.

Ce fut, pourrait-on dire, la première manifestation anglophobe de ce futur Grand – qui en fit bien d’autres – encore que cet aperçu soit un peu rigoureux à l’égard d’un gosse. Néanmoins, l’incident préfigurait en quelque sorte ceux qui se produiraient plus tard, et l’aspect instructif de ce petit tableau est que les deux victimes anglaises du bambin restèrent assises jusqu’au bout sans prêter autrement attention à l’accès de colère de leur neveu. Attitude qui, pour lui, était pire qu’une remontrance et précisément celle que – devenu Guillaume II – il reprochera toujours à son oncle Bertie 7, et à l’Angleterre, d’adopter à son endroit.

7 Surnom familier donné au prince de Galles par sa famille.

 

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Le prince Guillaume dans son habit des Highlands ; en cette période qui ne s’était pas encore entièrement remise des séquelles du romantisme, la tenue écossaise était à la mode dans une Angleterre qui continuait à fort admirer Walter Scott.

 

Relativisons un peu la conclusion de Gordon Brook-Shepherd… Le futur Guillaume II n’avait que 4 ans lors de ce mariage. Il était bien trop jeune pour que l’ennui éprouvé au cours de la cérémonie puisse expliquer les rapports complexes (et souvent difficiles) qu’il entretint plus tard avec le Royaume-Uni, même si cet incident dénote un caractère assez remuant qui s’affirmera avec le temps et peut préfigurer certaines des réactions impulsives du futur Kaiser ; de plus, ses oncles Connaught et Clarence étant alors âgés respectivement de 12 et 9 ans il ne devait voir en eux que des compagnons de jeu. Aussi, pour finir, laissons la parole au Kaiser lui-même, lorsqu'il évoque cette cérémonie :

Plus nets encore sont les souvenirs relatifs à mon deuxième séjour en Angleterre, qui eut lieu en mars de l’année suivante, à l’occasion du mariage de mon oncle le prince de Galles, qui fut plus tard le roi Edouard VII. La bénédiction nuptiale, à laquelle je pris part en costume écossais des Highlands, eut lieu à la chapelle Saint-George à Windsor, et je me rappelle encore combien me plurent les beaux manteaux bleus des chevaliers de la Jarretière, quelle profonde impression me fit la musique des horse-guards, spécialement la grosse caisse (la grosse caisse était posée sur le dos d’un homme, et frappé par un autre), et combien je trouvai belle la marche nuptiale, tirée du « Songe d’une nuit d’été ». Toutefois la fête était un peu trop longue pour mon impatience enfantine, et lorsque mon oncle Léopold, le futur duc d’Albany, voulut m’imposer silence, je tirai contre lui le petit poignard qui faisait partie de mon costume écossais. Cette attaque me valut de nombreuses railleries, encore plusieurs années plus tard 8.

8 Souvenris de ma vie (Payot ; Paris, 1926) pp. 7-8.

 

 

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Bien des années plus tard, le Kaiser sur son cheval blanc aux côtés du duc de Connaught lors des funérailles d’Edouard VII.

 

 


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